L'entretien qui suit à été réalisé au cours d'un stage de psychologie de huit mois (du 13 octobre 1997 au 1er mai 1998), dans l'enceinte du Service Médical d'Urgence et de Réanimation de Cholet. Il réunit trois personnes :
  • Ifr : Un infirmier
  • Psg : La psychologue de l'équipe
  • Stg : La stagiaire en psychologie

    Cette séquence a lieu dans le cadre de l'une des réunions d'équipe hebdomadaires organisées par la psychologue.



  • ENTRE DEUX URGENCES



    Psg : Comment vous arrivez à ''évacuer'' ?

    Ifr : Il me faut au moins une heure
    Parfois on continue à travailler, à refaire les gestes.
    Mais il n'y a pas de visages.
    On revit des situations.

    Moi, je ne les revis pas, je continue.

    Pendant le retour en voiture ; grâce à la télé, en changeant de sujet, en investissant sur autre chose.


    Et pour ce qui est de la maison : l'autre, même s'il est averti, n'a pas forcément envie d'entendre parler de travail.

    Il y a des choses qu'on ne peut pas dire ... pas l'habitude.

    Il y a des coups durs qui arrivent souvent ; par vagues.
    Le plus difficile c'est lorsque c'est des jeunes, des bébés, des enfants... qui ont toute la vie devant eux.

    Lorsqu'il y a des accidents par exemple ; des événements survenus brusquement (différents d'un passif par exemple) ; des morts... alors qu'on ne s'y attendait pas.

    Ou lorsqu'on a encore une lueur d'espoir ... ; ça flanque un coup.
    On y repense ; et parfois longtemps après .

    Et on l'apprend le lendemain matin souvent, quand on arrive.

    La mort est un sujet tabou encore.

    ...Avec toutefois des changements de moeurs.
    Un phénomène culturel faisant que les deuils se font plus rapidement ; malgré les rites : laisser un certain temps pour que l'âme puisse sortir... passer le corps.

    Il y a des gens qui refusent la mort. ... ça implique une certaine gestion du temps : ... surtout, on a l'impression que plus rien n'est important ; il n'y a plus de limites. ... Et pour ce qui est du temps, on ne gère plus notre temps ; c'est la société qui gère notre temps à notre place : INFLUENCE - ALIENATION - DEPENDANCE
    Une influence omniprésente, sans même que l'on s'en rende compte.


    Stg : Et les choix personnels ?


    Ifr : OK, mais, dans ces cas là, on devient marginal, ... et encore, tes choix , ils ne sont pas forcément si peu influencés que cela. Comment savoir ?
    L'héritage culturel insidieux, qu'est ce qui le détermine ?


    Stg : Oui, mais... on en a conscience plus ou moins ; ou pas ... ?


    Ifr : Sur le thème de la différence : j'y suis indifférent.


    Stg : La différence en générale, d'accord ; mais il y a des différences, et parmi elles, certaines qui vont plus ou moins nous arrêter, nous intéresser, nous attirer ; auxquelles on va être plus ou moins sensible.


    Ifr : ..... ; ... Les séances par exemple, elles sont prévues administrativement : il n'y a pas de culpabilité a avoir par rapport aux autres.


    Stg : Oui mais, quand les autres travaillent et que toi tu es là ... ?, d'autant que certains viennent ici uniquement pour ne pas travailler, ...ils me l'ont dit. ... ?


    Ifr : ''heureux'' : ''je me fais psychanalyser''
    ... je pense qu'on fait chacun une recherche intérieure personnelle et qu'on a pas besoin des autres pour ça.


    Stg : Oui ça d'accord mais si vraiment on est seul, on tourne en rond parfois, sur soi-même...
    il y a nécessité à mon avis de se renouveler grâce à l'extérieur... avec la vie.


    Inf : ... ! ... C'est rare une conversation comme celle là, hein ?


    Stg : Oui.


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